Bien sûr que
non ! Poser la question, c'est déjà y répondre ! Une association
culturelle telle que la Médiathèque ne poursuit d'autre but que de faire
aimer et connaître la musique au plus grand nombre et ce, en veillant à
maintenir l'équilibre économique de l'Institution. Car, trop nombreux sont
ceux qui nous placent au nombre des services publics alors que nous sommes
un service au public, soutenu par la Communauté française de Belgique
certes mais privé avant tout et, de ce fait, soucieux de maintenir son
activité.
S'il subsiste un doute sur notre action et notre rôle sur le public qui
nous fréquente, nos statistiques annuelles apportent quelques éléments de
réflexion intéressants. Notre "hit-parade" classique n'est pas une liste
des disques les plus vendus (rappelons-le, nous sommes un service de prêt
au public) mais une liste des disques les plus empruntés. Evidemment, rien
à voir avec les millions ou dizaines de milliers de compacts qui, par leur
vente, alimentent les "hit-parades" commerciaux. Restons modestes, nos
statistiques prennent en compte, pour un même titre, un nombre réduit
d'exemplaires (bien inférieur à 10 le plus souvent), déposé dans nos
collections parfois depuis plusieurs années et qui, par le biais de nos
messageries, est accessible à tous nos membres.
Ainsi, et non sans étonnement, voyons-nous apparaître dans les dix
premières places de notre "Hit Médiathèque Classique" des titres aussi peu
commerciaux que les Quintette à clavier et Quatuor à cordes
de Respighi, parus chez Chandos, le récital de Gustav Leonhardt sur
l'orgue Dom Bedos de Sainte-Croix de Bordeaux édité chez Alpha ou encore,
et toujours chez Alpha, un merveilleux programme consacré aux airs et
sonates de Philipp Erlebach. On y trouve également, chez Pierre Verany,
une sélection de madrigaux et de pages instrumentales de Merula et, chez
Pavane, les romances séfarades interprétées par l'ensemble "La roza
enflorese". Si Bach, Vivaldi, Fauré, Brahms, Chopin sont présents dans les
cinquante premiers titres de ce "hit-parade" assez particulier, Mozart et
Beethoven en sont absents et notre public leur préfère Tabart, Jommelli,
Kozeluh ou les "chefs-d'oeuvre de la polyphonie portugaise".
À l'heure où le marché du disque s'interroge sur son destin, il n'est
peut-être pas inutile de se poser les vraies questions et d'être davantage
sensible à la demande d'un public qui, bien conseillé, est ravi de
s'évader des chemins battus pour s'ouvrir à de nouvelles harmonies. Comme
nous l'avons souligné à plusieurs reprises, de petits producteurs
courageux réussissent à attirer les mélomanes fatigués, sans doute, d'une
overdose de grands classiques trop ressassés. Mais, soyons-en fiers, il
faut aussi l'enthousiasme de nos collaborateurs pour guider ces mêmes
mélomanes heureux d'être l'objet d'attentions dont les prive la
disparition progressive des disquaires spécialisés. Enfin, nous constatons
aussi que notre magazine "Travers-sons" n'est pas sans influence sur les
choix du public. C'est là une reconnaissance, à laquelle nous sommes
particulièrement sensibles, des efforts que nous fournissons tout au long
de l'année dans des conditions bien proches du bénévolat.
Merci donc à vous qui nous faites confiance et que nous retrouvons avec
bonheur pour une nouvelle saison musicale et discographique. Dans ce
numéro de rentrée, vous trouverez nos rubriques habituelles, nos coups de
cœur discographiques et, dans les cadres des représentations qui débutent
ce 17 septembre à l'Opéra Royal de la Monnaie, un important dossier
Elektra qui vous révèlera les moindres intentions du compositeur et
mettra en évidence sa force créatrice exceptionnelle.
Bonne rentrée d'automne et bien cordialement à tous !