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Le propos peut paraître un peu simpliste mais
j’avoue mon malaise devant les milliards qu’auront coûtés
ces fameux jeux olympiques. Rien que sur le plan de la sécurité,
il y a là de quoi nourrir plus d’un affamé. Et tout
cela (hormis les prestations des athlètes qui suscitent ma plus
grande admiration) pour un grand show mondial dont l’intérêt
évident pour quelques-uns est de générer de nouvelles
et abondantes productions de billets verts, si non écologiques
! Car derrière tout cela, bien sûr, il y a d’énormes
enjeux publicitaires, lesquels faussent toutes les règles de
l’économie. Et les spectateurs d’affluer et de mettre
le prix pour se loger, pour se désaltérer, pour assister
aux diverses épreuves et grands défilés médiatiques.
Ceux-là même qui décrèteront que d’aller
au concert ou au musée, c’est bien trop cher !
J’en viens à rêver de jeux olympiques des musiques
classiques ! Imaginons un peu un immense espace où puissent se
construire auditoriums, théâtres à ciel ouvert pour
les manifestations de masse, maisons d’opéras de toutes
dimensions et que, du monde entier, artistes chevronnés et débutants
accourent et se donnent la main pour porter bien haut le message universel
de la musique…. Ce serait superbe mais il faudrait pour cela que
les grandes firmes pourvoyeuses de crédits publicitaires se mettent
de la partie. Moyennant quelques petites concessions de la part des
artistes, cela va de soi ! Oublions les tenues sombres et uniformes
qui font partie des conventions de la dramaturgie classique et imaginons
un orchestre symphonique habillé aux couleurs d’une maison
internationale de prêt-à-porter. Débarrassés
de leurs robes de soirées et des costumes sombres qui ne laissent
entrevoir que les éclats de montres ou bijoux prestigieux, les
solistes apparaîtraient en tenue décontractée, maillots
de corps bariolés, sweet-shirts sur lesquels seraient écrits
en lettres géantes le nom des généreux sponsors.
Sans oublier, les sandales et autres chaussures de jogging tellement
plus confortables pour se mouvoir sur scène que ces pompes guindées,
équipées ou non de talons hauts ! Enfin, les vainqueurs
des nombreux concours rentreraient chez eux le portefeuille alourdi
de liasses et contrats tandis que leur étude de la Méphisto-valse
serait interrompue par le tournage de séquences publicitaires
à la gloire de nourriture pour chiens et chats ou de quelque
complément nutritionnel incontournable pour conserver, intactes,
les facultés intellectuelles.
Bien, j’en reste là de ce petit rêve éveillé
auquel la canicule n’est pas étrangère ! Tout simplement,
je continuerai à m’étonner du fossé croissant
entre commerce et culture et de voir celle-ci fondre comme neige au
soleil, même si on n'en a jamais tant parlé qu’aujourd’hui.
Mais sont-ce vraiment bien les jeunes qu’elle touche ou les survivants
d’une époque que je sens de plus en plus révolue
?
En attendant, ce nouveau numéro de Travers-sons vous
offre, hormis de nouveaux commentaires discographiques, un chapitre
supplémentaire de notre grande saga consacrée aux femmes
compositrices et, dans le domaine de la musique lyrique, il vous ouvre
les portes d’une œuvre trop méconnue des mélomanes,
Der Kaiser von Atlantis de Viktor Ullmann.
À tous qui nous rejoignez fidèlement, que cette fin d’été
soit douce et que vos évasions soient sources de plaisirs infinis.
Très cordialement à tous !
Pierre Watillon
Rédacteur en chef
Août 2004
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