Reconnaissance tardive de la femme compositrice - 5

 
Fanny Mendelssohn-Hensel - DM3952

 

 

 

 

Les femmes et la musique - deuxième partie

À l'époque baroque, les princesses s'investissent dans la musique comme symbole de culture et commencent à prendre des leçons auprès des plus grands musiciens de cour. Née de cette conjoncture, l'idée d'un art musical d'agrément pseudo-culturel apparaît au XVIIIe et se poursuivra jusqu'à l'aube du XXe siécle. Elle prévaut parmi la bourgeoisie parvenue pour qui le "ma-fille-fait-de-la-musique" permet surtout d'escompter pour elle un bon parti. L'éducation musicale apparaît comme un investissement.

Mais attention, même si le nouveau modèle d'éducation leur permettait, non sans paternalisme, de se consacrer à des activités musicales, on ne fit plus appel à leurs capacités réellement créatrices, ni à toute l'étendue de leurs connaissances. Avec la période classique, on commence à discuter leur capacité de créer "du grand art", tout au plus leur accorde-t-on alors de composer des mélodies ou de la musique de chambre, de jouer du piano-forte ou de chanter. On leur conteste le droit de faire interpréter leurs oeuvres en public.

Fanny Hensel a reçu une formation musicale aussi remarquable que celle de son frère Félix Mendelssohn, mais seul ce dernier fut autorisé à être musicien professionnel. En tant que femme, elle ne fut pas prise au sérieux comme compositeur. De plus, née dans une riche famille juive, il lui fut refusé sans appel, par ses parents comme par son frère, d'être socialement autre chose que bonne épouse et bonne mère. Y eut-il quelque intérêt personnel ? Rappelons que certains de ses premiers lieder furent publiés dans l'opus 8 et 9 de son frère.

Clara Schumann devint virtuose du piano, son père avait décidé avant la naissance de l'enfant d'en faire un musicien accompli. Célèbre dans toute l'Europe, elle fit une grande carrière de concertiste. Elle a interprété un répertoire d'avant-garde pour l'époque, elle fut la première à jouer en Allemagne les oeuvres de Chopin, Schumann et Brahms, auquel elle était unie par une longue et profonde amitié. La réputation exceptionnelle de Clara pianiste a quelque peu occulté celle de la femme compositeur même si elle-même n'eut jamais l'ambition de rivaliser avec les hommes. Bien sûr, la pression sociale, le fait d'avoir épousé un compositeur de génie a dû représenter un facteur supplémentaire de dissuasion. Mais, les écrits et les propos tenus par Clara Schumann semblent indiquer quelle même - pouvait-elle faire autrement ? - condamnait d'emblée les compositrices et que les femmes ne pouvaient pas être à la fois femmes et compositrices.

Pour qu'une femme puisse accéder à la composition de musique orchestrale, chorale ou de musique de chambre "sérieuse", elle devait faire valoir des talents d'interprètes sur un instrument lui permettant de faire entendre sa musique en famille ou dans des salons privés. Rares étaient celles qui se voyaient publiées et encore moins mentionnées dans les programmes de concert. Louise Farrenc dont l'oeuvre fut longtemps considérée comme perdue ou éditée sous le nom de son mari, Aristide Farrenc, eut toutes les peine du monde à faire exécuter au célèbre Gewandhaus de Weimar son Quatuor pour piano qui finira quand même par être joué avec succès.



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