Oubliée pendant des siècles, la musique baroque
sud américaine sort de l’ombre depuis une dizaine
d’années, grâce à l’acharnement
de quelques musiciens et musicologues dont le plus célèbre
est Gabriel Garrido, avec l’aide du label k617.
Certains
manuscrits retrouvés en piteux état, moisissant
dans des placards, voire des poubelles, ont du être
en grande partie reconstitués, mais le résultat
en vaut largement la peine.
Depuis
l’arrivée des conquistadors, fin du XVe siècle,
le continent est divisé en vice-royautés,
disposant chacune d’un gouvernement propres mais,
toutes dépendant de l’Espagne.
La
Nouvelle Espagne part de la Floride actuelle, englobe le
Costa Rica, les Caraibes et le Mexique; la Nouvelle Grenade
occupe les territoires de l’actuel Venezuela, Colombie,
Panama et Equateur ; le Pérou est constitué
des audiences de Lima, Cuzco et du Chili ; La Plata englobe
la Bolivie, le Paraguay, Argentine et l’Uruguay et
enfin le Brésil.
La musique fut introduite sur le nouveau continent par les
missionnaires franciscains d’abord, puis par les dominicains,
les augustins et enfin, les jésuites. Elle occupe
une place prépondérante dans la conversion
des Indiens car, dans leur culture, la musique est absolument indissociable
du culte.
Dès
les années 1520, les indigènes sont incorporés
à des maîtrises où ils mènent
une carrière de musicien professionnel ; l’apprentissage
est très strict mais, en contrepartie, ils bénéficient
d’avantages considérables, comme l’exemption
d’impôts par exemple. La hiérarchie reste
cependant strictement réglementée : les indigènes
n’ayant pas accès à la prêtrise,
ils restent confinés à des postes subalternes.
Les
chanteurs sont toujours accompagnés d’instruments
et, aux côtés des instruments occidentaux,
on trouve également les instruments traditionnels
comme par exemples les bajunes, sorte de grandes flûtes
de pan.
L’
Eglise va vite trouver cette présence indigène
inconvenante et, dès 1561, exige de réduire
le nombre de musiciens natifs, de même qu’elle
implante l’orgue, instrument divin par excellence,
en opposition à ces instruments impurs !
En
Nouvelle Espagne, la vie musicale se développe autour
de deux centres : la cathédrale de Puebla, puis celle
de Mexico.
Sous
l’impulsion de deux maîtres de chapelle en particulier,Juan
Garcia de Zespedes, puis Gaspar Fernandez (1566/1629) ,
la cathédrale de Puebla va connaître un siècle
resplendissant. D’un esprit plus dynamique et innovateur
qu’à Mexico, les genres nouveaux se développent
avec à peine quelques années de décalage
avec le vieux continent.
Le
villancico, dérivé espagnol du virelai médiéval,
basé sur le principe des couplets (coplas), reliés
par un refrain (estrebillo), devient le genre musical caractéristique
du nouveau monde.
Art presque populaire, il était chanté en
langue profane, voire en dialecte local et contenait des
éléments empruntés au théâtre
sur des sujets religieux.
Il
n’y a pas de musique profane, de même qu’il
n’y a pas de musique purement instrumentale (à
part la musique d’orgue) car elle est toujours associée
à une fonction : la musique, la danse et la célébration
religieuse sont une seule et même chose.
Il
n’existe pas de catégorie non plus; séculaire,
populaire ou sacré, tout est intégré
dans un seul genre, comme en architecture ou en sculpture.
On
peut remarquer une grande influence des musiques indigènes
: utilisations de la langue Nahuatl et Quechua, intégration
des rythmes populaires qui se retrouvent dans les xacaras
ou les negrillas par exemple ( ces derniers utilisent des
rythmes africains !!).
A la
cathédrale de Mexico, trois maîtres de chapelle
nous ont laissé des œuvres remarquables, Francisco
Lopez Capillas (mdc 1654-1674), Antonio de Salazar (1650-1715)
et Manuel Sumaya (1678-1756). Ce dernier semble être
le premier créole à obtenir une charge aussi
élevée ; il terminera sa vie à Oaxaca
où la plupart de ses œuvres sont aujourd’hui
conservées.
Pour
en savoir plus, écoutez les disques et lisez les
livrets qui sont en général très bien
faits et bien documentés….
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