Les femmes et la musique - Première partie
La pionnière dans l'art de composer fut Hildegard
von Bingen. Porte-drapeau de la cause féminine, elle
adresse plusieurs de ses chants et psaumes à la Vierge
Marie (ainsi O clarissima mater et O tu illustrata)
à côté desquels plusieurs autres, comme
O ecclesia rendent hommage au martyr de Sainte
Ursule qui fut assassinée à Cologne avec les
onze mille jeunes femmes de sa communauté. Heureusement,
Hildegard n'eut pas à subir le même sort mais
dut, toute sa vie, se battre pour maintenir l'indépendance
et la sécurité de son couvent. Figurant avec
Aliénor d'Aquitaine, Catherine de Sienne et Héloïse
parmi les personnages marquants du Moyen Âge, elle
incarne aujourd'hui davantage l'image d'une visionnaire,
d'une mystique que celle d'une musicienne compositrice.
Aux XIIe et XIIIe siècles,
les femmes troubadours ou trobairitz sont représentées,
en moindre proportion que la gent masculine, dans ce bouillonnement
créateur où la femme est constamment évoquée.
Les oeuvres et les noms des troubadours (au nombre de 460
dont 20 femmes) proviennent d'une cinquantaine de florilèges
manuscrits écrits aux XIIIe et XIVe
siècles. Ils regroupent environ deux mille textes,
parmi lesquels vingt-cinq émanent de femmes. Une
vingtaine de chansonniers contiennent les mélodies
notées des textes mais une seule de trobairitz, une
chanson de la comtesse Béatrice de Die. Toutes ces
représentantes, identifiées grâce aux
"vidas", biographies des troubadours qui annoncent
les textes d'une vingtaine de chansonniers, étaient
de noble lignage. Cet état leur a probablement permis,
dans une tradition orale où les seuls écrits
concernaient les hommes, de laisser une trace écrite.
Les XVIIe et XVIIIe siècles
admettent l'image de la femme musicienne. Le fait que les
femmes embrassent une profession artistique n'était
pas en contradiction avec les modèles d'éducation
en vigueur à l'époque. La plupart des jeunes
femmes instruites étaient dans les ordres, telle
Isabella Leonarda (1620-1704). Jouissant de la sécurité
matérielle au sein de l'Église, elles bénéficiaient
de l'enseignement d'un maître de musique et pouvaient
s'exercer à la composition mais devaient par leur
art s'en tenir au domaine sacré et à la seule
gloire du tout puissant.
La courtisane représente l'autre monde du Haut Baroque
italien où pouvaient se produire, évoluer
les femmes musiciennes de métier. Indépendante,
elle assurait par ses charmes et son esprit sa propre subsistance
et était l'artisane de sa destinée. Les textes
historiques mettent sans cesse en évidence telle
ou telle artiste, en raison de son intelligence, de l'étendue
de ses connaissances et de la maîtrise de plusieurs
langues. Il n'était pas rare qu'elle soit, à
l'instar de Barbara Strozzi, membre d'académies ou
de foyers artistiques de plus en plus nombreux en cette
période.
Les femmes et la musique -
2e partie>>