Georg Friedrich Handel
Les compositeurs dont nous venons de parler
ne représentent qu'une partie des musiciens anglais actifs
entre 1700 et 1750 en Angleterre. Peu connue, la période
baroque est riche de nombreuses œuvres qui n'attendent qu'à
être redécouvertes. Face à cette intense vie musicale, il
est étonnant de constater que cette période fut entièrement
occultée par la personnalité d'un seul musicien de génie
venu de Saxe : Georg Friedrich Handel (1685-1759).
Händel, Haendel, Handel ou Hendel ?
Handel, forme anglicisée du patronyme
Haendel, est couramment utilisée pour la partie anglaise de
la vie du compositeur. On ne trouve d'ailleurs jamais de
signature autographe du compositeur sous la forme Haendel
mais bien Handel, Händel ou Hendel.
Installé à Londres à partir de 1712, Handel fit de
l'Angleterre sa seconde patrie. Si Francesco Geminiani passa
à Londres à peu près le même laps de temps que Handel, ce
dernier a réussi à modeler son style sur le goût et les
attentes du public britannique comme le révèle l’évolution
de son oeuvre.
Important avec lui l'opéra italien avec des
œuvres comme Rinaldo (BH3871
-
BH3873), il abandonna progressivement ce genre au profit
de l'oratorio et de la musique instrumentale. Le processus
qui amena Handel à abandonner l'opéra italien fut
probablement hâté par la création en 1728 du Beggar'
opera de John Gay et Johann Pepusch dans lequel résidait
une satire des opéras mythologiques aux intrigues à
rebondissements.
Pourquoi l'oratorio connut-il tant de succès en Angleterre ?
Ce genre venu d'Italie, lui aussi, mettait en musique une
histoire spirituelle sans action scénique mais comportant
des airs, des duos, des trios, des chœurs et des parties
orchestrales, chantés en anglais par des Anglais et
représentant des personnages issus, pour la plupart, de
l'Ancien Testament, soutenus par de puissants chœurs. Il est
stupéfiant de constater, qu'entre 1720 et 1733, Handel a
composé pratiquement deux opéras par an, tout en ne
négligeant pas les autres genres musicaux qu'il pratiquait.
Rapidement, une rivalité s'installe entre Handel et
Bononcini. Le combat se fera "à coups d'opéras", ce qui
explique l'intense production de ces années : Radamisto
(BH3853),
Floridante (BH3721),
Giulio Cesare (BH3745),
Tamerlano (BH3942),
Alessandro (BH3592),
Partenope (BH3821),
pour n'en citer que quelques exemples.
À partir de 1733, Handel fut amené à faire ses premières
tentatives dans le genre de l'oratorio. Sans conviction.
Malgré le succès de Deborah, Sacred Drama in
English (BH4153)
et de Attalia (BH4102),
il se tourne à nouveau vers l'opéra, à un rythme encore plus
soutenu. Grâce à la concurrence effrénée entre compositeurs,
la vie musicale à Londres offrait au spectateur une richesse
incomparable.
1738 marque un tournant dans la production
de Handel. Suite à des ennuis de santé suivis de problèmes
financiers, il délaisse un peu l'opéra au profit de
l'oratorio. Israël en Egypte (BH4184),
Saül (BH4394)
connaissent d'emblée le succès, succès qui allait
accompagner les autres créations de Handel jusqu'à la fin de
sa vie : Le Messie (BH4280),
Judas Macchabeus (BH4238),
Jephta (BH4203),
Solomon (BH4433)
ramenaient le public en pays de connaissance, ce qui
explique leur succès. Il fallut néanmoins près de dix ans
entre la création de la version définitive de Esther
(BH4162)
et celle du Messie à Dublin en 1742 (BH4280)
pour que Handel, abandonnant l'opéra, impose l'oratorio au
public britannique. La suite de sa production fit du
compositeur un héros national.
C'est bien dans l'oratorio que Handel dessine un style plus
purement insulaire grâce à la puissance de ses chœurs qui
font souvent appel à une écriture fuguée. La grandeur est
aussi recherchée par l'effectif orchestral, notamment par
l'usage des cuivres et des percussions.
Ces deux domaines où Handel a su se montrer brillant ne
doivent pas faire oublier les autres talents du compositeur.
À son arrivée en Angleterre, Handel trouva un protecteur en
la personne du Duc de Chandos. Il lui dédia de nombreuses
œuvres dont la première version de Esther et les Chandos
Anthems (BH4711
-
BH4712 -
BH4713).
Plusieurs œuvres furent commandées par la cour. Ainsi, les
Coronation Anthems (BH1234)
écrits à l'occasion de la montée sur le trône du roi Georges
II en 1727 ou le Dettingen Te Deum (BH4929)
commémorant une victoire sur les troupes françaises.
Dans le domaine instrumental, la Music for the Royal
Fireworks (BH1238)
destinée aux fêtes offertes par Georges II pour commémorer
la fin de la guerre de la succession d'Autriche (1748)
permet de mesurer tout le chemin parcouru par le
compositeur depuis la Water Music (BH1139)
de 1717. Entre ces jalons, Handel composa deux séries de
concertos grossos (BH1506), deux séries de suites
pour clavecin (BH3131),
trois séries de concertos pour orgue (BH1766)
ainsi que des sonates pour divers instruments et basse
continue.
Ne faisant l'objet d'aucune commande
particulière, ces œuvres instrumentales viennent étoffer le
catalogue des partitions éditées de Handel, ce qui lui
procurait une source de revenus non négligeable. Elles sont
donc destinées aux musiciens amateurs de bon niveau qui se
produisaient dans les salles publiques à Londres ou à
l'étranger. Les concertos pour orgue ont servi
d'intermèdes entre les actes des oratorios. Handel y a tenu
lui-même le rôle de soliste, introduisant de brillantes
improvisations dans le cours des mouvements car, en plus de
ses activités de compositeur, il se produisit comme
interprète à de nombreuses reprises tant à l'orgue qu'au
clavecin.
Son influence sur la vie musicale anglaise allait se
prolonger bien au-delà de sa mort en 1759, ses compositions
restant au programme de concerts jusqu'à nos jours.
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